martes, 27 de noviembre de 2018

XIII ENCUENTRO INTERNACIONAL DE ESCRITORAS -MARRUECOS 2018- EN HONOR A FÁTIMA MERNISSI



- Tetuán: 25 al 28 de octubre, 2018

   - Rabat: 29 de octubre, 2018

- Nombre: Leonor MERINO GARCÍA

- País de procedencia: España (Madrid)





                                               Fatima Mernissi:

                                   un brocart de fils son oeuvre

                         autobiographie, art, histoire, critique sociale


Bismillah ar-Rahman ar-Rahim

بسم الله الرحمن الرحيم

À la tombée de la nuit du lundi 30 novembre 2015 – mon esprit encore envahi par le Festival de Poésie sur les « Poètes Palestiniens » dont j’avais eu l’honneur de les donner à connaître et de réciter leurs poèmes pour la première fois au public madrilène –, je reçois un coup de téléphone d’une collègue avec laquelle j’avais été au Colloque International de l’Université d’Été à El Jadida. En décrochant le téléphone, je remarque sa voix avec un fond amer : “Mernissi est morte à Rabat”.

Peu après, le plus important journal espagnol, EL PAÍS, reçoit mon article demandé – publié immédiatement sur sa page internet et puis sur papier[1]


elpais.com › Cultura )

Attristée encore de sa perte inesprée et inéluctable, j’offre une conférence à l’« Instituto Egipcio de Estudios Islámicos » de Madrid[2] et à d’autres Centres Culturels de cette même ville.


Fatima – c’est à toi à qui je m’adresse – : mes souvenirs avec toi débordent ma mémoire. Combien de fois mon écriture, mes articles et mes ouvrages t’ont entourée, de même que j’ai été témoin de ta lucidité dans des congrés ou dans des débats partagés : la trace narrative de ta voix sensuelle ! Ta grâce et ton élégance bien andalouses viennent à ma rencontre : c’est ton image métisse, démesurée, mouvante.

Nous sommes – maintenant – coude à coude à « El Ateneo » de Madrid en 1990, tu es habillée avec des couleurs bariolées et harmonieuses: ta blouse inspirée de dessins marocains classiques (telle l’oeuvre Du signe à l’image. Le tapis marocain de notre regretté ami commun Abdelkébir Khatibi[3] qui avive mes vers pour vous deux : “El viento engarzado en el arpa / el verso en el tapiz”[4]) ; ton poignet orné de beaux bracelets et tu portes tes grands boucles d’oreille en forme d’aiguilles tintenant comme la pluie argentée.
Pleine d’humour, habile, perspicace. Ta joie de vivre, ta capacité de te surprendre devant ces petites démangeaisons presque quotidiennes, ces ennuis de la vie sociale.





Tu joues à te déguisser avec un vibrant fichu, tout en cachant un oeil, ramassant avec adresse ton cheveux abondant, te couvrant une épaule..., avec une intensité décontenancée dans ta façon de rire, de raconter.

Ton langage corporel me parle parle des femmes et ma vive sensibilité assiste à une scène théâtrale, privée, particulière où tu es en train de nous raconter : on est comme ça, nous nous cachons, je voile mon oeil, ma bouche ; je ne me soucie pas si on ne me connaît pas, c’est suffisant avec mes écrits ; nous rions, nous savons pénétrer dans les pensées de l’homme, nous sommes puissantes.




Oui, Fatima, je sais, ta biographie est partout, puisque c’est toi qui la rédiges dans tes essais et la racontes dans tes nombreux entretiens avec les médias.

Ta mère illetrée te met au monde à Fès en 1940. Tu es déjà emmitouflée, gâtée par ta famille de la haute bourgeoisie et cette ville millénaire imprègne ton esprit à toujours ainsi que le harem domestique où tu es en train de grandir : cet entourage deviendra l’axe de ton écriture !

À la fin de la 2ème G. M., tu es inscrite dans une des écoles privées du Maroc et après l’obtention d’une bourse, tu poursuis tes études à l’Université de la Sorbonne où tu reçois une licence en Sociologie. En suite, ta formation aux États Unis afin d’être reçue docteur en Sciences Sociales. À ton retour au Maroc, tu es professeur à l’Institut Universitaire de la Recherche Scientifique relevant de l’Université Mohamed V de Rabat.

Te voici donc une spécialiste sur l’étude de la femme des sociétés musulmanes et une consultante engagée de l’UNESCO.

En 2013, tu es au « Teatro Campoamor » de Oviedo, une ville historique du Nord de mon pays : bras dessus, bras dessous avec Susan Sontag, vous souriez tenant dans vos mains les rouleaux du Prix partagé, “Príncipe de Asturias de las Letras”, attachés par un ruban avec les couleurs de mon drapeau espagnol.


Lors de cette remise, c’est en ton honneur que je rédige des articles pour le journal de la « Communauté Autonome de León »[5] et aussi pour une importante revue littéraire sur l’actualité culturelle de l’« Instituto Egipcio de Estudios Islámicos de Madrid » : “El hombre progresista debe reivindicar su feminidad y más vale escribir que hacerse un lifting[6].

Mais ne le sais-tu pas encore ? Après trois années, où tu n’es plus parmi nous, une chaire est à ton nom par l’initiative de ton université et du « Business School ».

Tu as bien réussi, “tant [ta] mère était soucieuse de [te] voir échapper à la tradition. [...] la tête haute sur la planète d’Allah en regardant les étoiles” (Rêves de femmes. Une enfance au harem). Une sentence que tu répètes partout : “Si tu as un problème, alors lève la tête, regarde les étoiles et bouge ! ”

Voilà comment le sortilège de ciseler des mots porte le rêve maternel d’une vie palpitante pour toi, ainsi qu’il élargit ton rêve de rendre les frontières inutiles.

Cependant, le saut entre deux cultures a dû jadis te coûter toute l’élasticité, tout l’éclaircissement de ton âme d’écrivain.

Cet élan aide afin que tu deviennes l’une des voix les plus éloquentes du féminisme islamique et une autorité mondiale dans des études coraniques.

En conséquence, ta connaissance de la culture islamique depuis ses entrailles et ton éducation occidentale permettent d’expliquer leurs sens les plus profonds, afin de dénoncer leurs excès et nous faisant aussi participer à leurs vertus.

Tu nous dis que l'important c'est de dépasser les blocages qui empêchent et étouffent le désir de parler, car toute initiative privée est bid’a[7] (innovation) face au nif (l’honneur), et que l’imaginaire ne doit pas être bridé par des huddûd (limites), car “la frontière est une ligne imaginaire dans la tête des guerriers”.

Une fois donc notre libération conquise et la création personnelle assumée (comme accès à la vérité de l’écriture et à la création), il faut valoriser le combat de la femme se libérant des traditions surannées, démasquant les situations, luttant, contre l’inertie et l’entropie de tout un système, à travers des écrits ou des personnages littéraires.

En même temps, il faut donner à la femme de la promotion (les éditeurs marocains peuvent y réaliser un remarquable effort et je me souviens de Retnani) et il faut aussi déplorer la marginalisation de quelques oeuvres et “corriger” même l’histoire de la littérature.

L'écriture étant ce combat des moments heureux ou douloureux à pouvoir exprimer pour de larges publics.

Et voici le ravissement : des mots chevauchent déjà tes rêveries, nos rêveries. Voilà pourquoi ton oeuvre – éloignée des stéréotypes et de la manipulation politique – est une référence intellectuelle pour comprendre le monde arabo-musulman et l’un des piliers de la littérature contemporaine.

J’y trouve la défense des femmes, basée sur un concept humaniste, dont nous devons assumer notre propre rôle dans chaqu’une de nos sociétés luttant avec et par la parole, avec l’étude et la formation, qui représentent les armes principales de l’égalité et de la révolution.

Puisque l’inégalité du savoir est implacable : l’une des sources principales de la tyrannie.

Tu sais bien que Zakya Daoud – dans son essai Féminisme et politique au Maghreb[8] –, nous dit que l'essentiel dans la lutte de la femme, c’est qu’il faut obtenir l’égalité à travers notre propre conscience sur cette égalité. Â côté de toi, je désire aller un peu plus loin vers notre pulsion : c’est-à-dire avoir la conscience de la nécessité d'écrire.

C’est pourquoi je me souviens encore de ta pensée marquée au coin de l’ironie qui se rapporte à la “fantaisie de l’imagination [ou] du style d’un écrivain[9]”. Cette oscillation vertigineuse en s’inscrivant dans le lieu supérieur du questionnement (ironie). Voici tes mots :

 “J'espère que nous, les femmes, n'aurons pas à attendre jusqu'en 2093 pour que nos leaders oublient leur imagination des femmes soumises. L'été dernier, en pensant à tout cela, je me suis rappellée une annonce connue sur le combustible : Mets un tigre à ton moteur ! J'ai pensé que les femmes musulmanes devraient lancer une grande campagne publicitaire mise au point à nos leaders, pour assommer leurs cervaux avec ce slogan : Mets une femme forte dans ta vie !

Nous savons, Fatima, que l’ironie narrative ou discursive suture le texte ou la parole en tissant des rapports : d’abord, entre les voix différentes dont elle se fait l’écho adhérant ou parodique, mais aussi en gommant les frontières entre récit et dialogue[10].

            De même que ton compatriote, le grand narrateur Driss Chraïbi, vous deux puisez aux sources du peuple, celles qui vous offrent la dialectique et l’humour dans vos oeuvres, afin que l’ironie apparaisse sous une forme hybride, puisqu’elle côtoie l’humour et se confond parfois avec lui.

            En conséquence, si l’ironie satirique (dérision comme contre-pouvoir et un procédé reconnu de la satire) vise les tyrans qui gouvernent le peuple et l’écrasent, l’humour aiguillonne le peuple, sous une certaine façon de “blaguer” qui n’est pas innocente : “Nous dépeignons cet ennemi sous des traits mesquins, vils, méprisables, comiques, et grâce à ce détour, nous savourons sa défaite que nous confirme le rire du tiers”[11].

            C’est ainsi que dans Le Harem et l’Occident, sur une tonalité de badinage assaisonnée d’une pincée d’ironie, on apprend que les arabes craignant que leurs femmes s’envolent, ils les enferment et aussi que dès l’échauguette de notre monde aisé – aïe –, les pouvoirs des médias et les pouvoirs monétaires maîtrisent les femmes à travers la publicité afin d’être minces, belles et jeunes à jamais – autrement dit le mépris envers celles qui vieillissent –. Voici donc notre propre harem : “la tyrannie de la taille 38”.


            Alors, tandis que dans l’autre culture, l’homme utilise l’espace afin d’établir la domination masculine essayant d’exclure la femme de l’arène publique, dans notre culture l’homme contrôle l’espace – un corps maigre – afin de luire la femme, non moins prisonnière d’autres paramètres culturels : “d’abord elle existe pour et par le regard des autres”.

            Le brocart de cet ouvrage est façonné par l’ourdissage des fils différents : la vision de l’harem – espace interdit et protégé en langue arabe –, le tissu oral, les miniatures ornementales des livres – la principale production picturale de l’art islamique –, le treillis des manifestations artistiques, la littérature (Poe), le ballet et la peinture “exotique”, afin de nous montrer que la représentation occidentale de l’harem ne correspond pas à son signification – une prison frustrante – ni non plus à l’historicité, puisque tandis que Henri Matisse peigne ses odalisques turques[12], Kémal Atatürk – leader nationaliste et le “Père des Turcs” – promulgue des lois dans son pays qui offrent à la femme le droit à l’éducation et au vote.

            C’est une leçon aussi à travers la création artistique, afin de souligner les fantasmes masculins sur les femmes puisque, tout en suivant placidement cette lecture, nous nous étonnerons sachant que, pendant les années quatre-vingt-dix, le pourcentage de femmes inscrites aux Facultés de Génie Civil en Egypte, en Turquie ou en Syrie, doublait celui du Royaume Uni, de l’Hollande ou du Canada.

            Fatima, tu démontes aussi les fantasmes occidentaux signés par la peinture orientaliste qui a créé un harem à l’européenne : “l’odalisque passive inconnue dans l’histoire musulmane” : Êtes-vous vacciné contre le harem ?

            Tu puises dans les historiens musulmans, Ibn Saad ou Tabari, pour affirmer que ces femmes étaient cultivées, jalouses et combattantes, astucieuses et puissantes.

            Tu nous dis que pour les musulmans c’est l’“intelligence incontrôlable”.

De ces deux représentations se dégagent deux visions de la femme, l’érotisme et les relations entre les deux sexes dans le monde musulman et chrétien.


Ah, oui, ça fait longtemps que je connais tes textes depuis ton essai, qui sera la matrice de ton oeuvre à venir, Sexe idéologie islam – traduit de l'américain par Diane Brower et Anne-Marie Pelletier – qui allie des ébauches théoriques, des conversations et des études sur le terrain et sur l’analyse des relations entre l’homme et la femme, la sexualité, les liens familiaux, la ségrégation territoriale, l’idéologie islamique traditionnelle face aux commotions socio-économiques modernes et devant les contradictions douloureuses qui peuvent en ressortir.

Cependant, je me vois – jadis tenant entre mes mains le premier texte qui m’a heureusement menée à ton écriture : le conte Qui l’emporte la femme ? ou l’homme ?, narré par Lal-la Laaziza Tazi.

Si le mythe explique le conte exprime : il essaie d’illustrer cette lutte séculaire et sans merci entre les sexes dans la culture populaire marocaine où la femme a toujours fait les frais à son corps défendant.

Et toi de dire : “Dans la culture populaire (notamment le conte oral), la relation entre la raison (‘aql) et la déraison, la violence, le déchaînement des passions (ach-chahaouat) est inverse du rapport entre les sexes, tel qu’il est officialisé dans la culture dominante – la culture masculine, la culture du sacré, celle de l’écriture et de la loi (au Maroc), où la femme est la déraison (fitnah) et l’homme le dépositaire de la raison et de l’ordre, etc. […]. La guerre des sexes est déclarée !”

Et je lis, relis, La femme dans l’inconscient musulman, texte signé par Fatna Aït Sabbah : ton pseudonyme afin de te sauver des menaces supposées qui pouvaient mettre en péril ta liberté d’expression au futur, ou bien ton intégrité physique au présent d’alors.



Ah, oui, il a provoqué tout un scandale car, en alliant l’analyse sociologique et la science des textes, il plonge dans l’histoire des représentations, comprises comme les plus oscures et inconscientes. Il explore l’image de la femme dans le discours ortodoxe : subalterne, tentatrice.

Mais, il dévoile aussi un aspect inconnu de la littérature musulmane : un discours érotique religieux qui révèle une femme omnisexuelle.

Toi, tu nous invites à nous poser une question, à soulever l’interrogant de savoir ce qui arrive lorsque ce discours entre en contact avec la modernité et les démentis factuels que le discours orthodoxe inflige.


Et tu ne te retournes pas sur le passé avec un regard affectif, mais avec une pulsion émotionnelle : le Prophète Mohamed – Dieu a prié pour lui et l'a salué : salla allahou alyhi wa salam – devient le protagoniste[13], dans Le harem politique. Le Prophète et les femmes, pour être un défenseur de la dignité de la femme et pour l’ouvrir les portes des mosquées, dans les mêmes conditions que l’homme.

Courageuse, tu attribues la responsabilité des hadiths mysogynes à certains compagnons du Prophète : Abu Bakra[14] et Abu Huraïra.

C’est la femme préférée du Prophète, Aïcha, qui conteste elle-même de nombreux hadiths de Huraïra : “Il n’est pas doué pour l’écoute et lorsqu’il est sollicité, il donne de mauvaises réponses”.  

Maintenant, te voilà parcourant Le Maroc raconté par ses femmes. Dans tes entretiens avec toute sorte de femmes, tu dis : “essayer de faire s’exprimer la femme illettrée c’est donner la parole à ce moi-même qui aurait pu être voué au silence ancestral”[15].


Ces femmes revendiquent l’égalité avec l’homme comme le fondement nécessaire d’une société démocratique. En conséquence :

“L’alphabétisation des femmes marocaines maghrébines est déjà un procès en marche et aussi la clé afin de conquérir l’égalité des aspirations et des droits : les femmes prolétaires du Maroc sont plus avancées que les intellectuelles et les universitaires comme moi, en ce sens qu'elles ont une idée plus égalitaire des sexes”.

Alors, l’histoire des femmes arabes est celle des citoyennes en entier, participant aussi activement de la vie sociale et politique de leurs pays, revendiquant les droits de la femme, comme les égyptiennes Aïcha Taymour, Huda Sha’raoui, la libanaise Zaynab Fawwaz ou bien les marocaines AsmaLamrabet, Nadia Yassine, Naamane Guessous.


Mesdames, Messieurs, chers collègues, Fatima Mernissi a aimé le Maroc qui l’a inspirée. Elle a bien connu la réalité de son pays qui assiste à une demande très forte de l’identité de ses femmes.


Au passé, avec des Sultanes oubliées et vient à ma mémoire Loin de Médine. Filles d’Ismaël d’Assia Djebar qui, comme Mernissi, a levé le voile de ces femmes inconnues par l’histoire moderne, des femmes de haute naissance et parfois des esclaves (yariya) qui ont réussi à s’emparer du pouvoir.

Et dans l’actualité et comment, avec Chahrazad n'est pas marocaine. Autrement, elle serait salariée !, à la recherche d’une titularisation et d’un salaire qui garantissent l’égalité avec l’homme sur le plan affectif et aussi économique



Une aspiration à laquelle les marocaines s’y consacrent complètement, accédant à l’université et participant avec leurs travaux dans son pays qui avance vers la modernité, en technologie et socialement, mais sans oublier ses propres paramètres socio-culturels.

Puisque si elles ont été autrefois éloignées de l’espace public, leurs revendications sont présentes dans tous les champs du savoir dont l’intelligence est nécessaire, tout en employant – à plusieurs reprises – les mêmes armes de Chahrazad : la beauté, l’esprit lucide, l’art de la parole, tout en offrant une réponse positive et belle, introduisant une notion clef de la critique littéraire actuelle: celle du lecteur ennemi nécessaire, afin de sauver la propre vie, afin de justifier sa fonction d'écrivaine, pour passer de la haine à l'amour, pour communiquer, transmettre.


De nos jours, les marocaines étudient dans des universités de son pays à la différence de l’ancienne élite qui poursuivait ses études ailleurs, en France, aux États Unis.

Mernissi toujours pionnière, pas seulement au niveau intellectuel, mais aussi en tant qu’activiste, elle n’a pas cessé d’organiser des ateliers d’écriture offrant la parole à la société civile marocaine puisque, comme je disais au début de cette communication, l’une des sources de son inspiration était d’écouter les gens parler : la culture orale.

Voici donc un autre thème qui l’a tenue bien au coeur : l’importance de la communication sur internet afin que les jeunes réussissent, Les Sindbads marocains. Voyage dans le Maroc civique, un texte fruit de ses conversations avec des filles et des garçons. Cette énorme vitalité des jeunes ruraux du Haut Atlas et du désert de Figuig et de Zagora, qui fait tomber les stéréotypes entre le rural et l’urbain.

De la même manière la technologie digitale, dans le monde arabe, peut signifier la fin du contrôle des médias et des prérogatives absolues du pouvoir (El hilo de Penélope).


L’avenir est donc entre les mains de la jeunesse du Maroc, de l’Algérie, de La Tunisie ou de l’Égypte, libérés des clichés.

Il faut tenir compte qu’on ne peut pas considérer “le monde arabe” comme un bloc monolithique, puisqu’il y a beaucoup de particularismes parmi les pays différents qui le conforment.

Pour finir, je désire aussi signaler que le “paysage islamique” du monde est pluriel, dense, riche par sa variation, par sa diverse législation et progression. Il est constitué par un long éventail d’évolutions et de pensées : religieuses, modérées, nationalistes, laïques, libérales, modernistes.

Dans son oeuvre, Mernissi plaide – comme de nombreux écrivains pour ne citer que Driss Chraïbi, Ghita El-Khayat, Abdelwahab Meddeb, Malika Mokeddem – en faveur d’un Islam originel ou les musulmans étaient libres dans leurs débats, dans l’adoption des lois et dans leurs conduites.

Mernissi rêva d’un monde sans “peurs” ni “frontières”, où l’étranger ne fait que multiplier les reflets et enrichir jusqu’à l’infini ce que nous sommes.

Fatema urqudi fi salam
Fatima repose en Paix

J’ai toujours pressenti une certaine tristesse dans ton for intérieur, lorsque tu racontais les coups bas des hommes savants vers quelques-uns de tes travaux, qui ont été bien louables et surtout engagés.

Cependant : “les femmes ont beaucoup pleuré culturellement, mais une fois les larmes arrêtées, à la place de larmes, ce qu’on aura abondamment c’est du rire. C’est l’éclat, c’est l’effusion, c’est un certain humour qu’on ne s’attend jamais à trouver chez les femmes et qui pourtant est sûrement leur force la plus grande”[16].
  



BIBLIOGRAPHIE


(svp : lire aussi les 15 notes en bas de page de ce travail)


MERNISSI, F., Sexe idéologie islam (traduit de l'américain par Diane Brower et Anne-Marie Pelletier), Paris, Tierce, 1983.


AÏT SABBAH, Fatna (pseudonyme), La femme dans l'inconscient musulman, Paris, Le Sycomore, 1982 ; traduction : Inmaculada Jiménez Morell, Madrid, Del Oriente y del Mediterráneo, 2000.


MERNISSI, Fatima, Qui l’emporte la femme ? ou l’homme ? Narré par Lal-la Laaziza Tazi; recueilli par F. MERNISSI. Coll., Kane wikoune, Rabat, 1983. Saladi, illus.; récit populaire marocain; traduction: Inmaculada Jiménez, Aixa y el hijo del rey o ¿quién puede más el hombre o la mujer? (Moreno, M. Ángel, ilus.), Madrid, del Oriente y del Mediterráneo, 1990.

MERNISSI, Fatima, Le Maroc raconté par ses femmes, SMER, Rabat, 1986 2ème éd.: traduction: Inmaculada Jiménez, Marruecos a través de sus mujeres, Madrid, del Oriente y del Mediterráneo, 1990.

MERNISSI, Fatima, Le harem politique. Le Prophète et les femmes, Paris, Albin Michel, 1987. Essai ; traduction: Inmaculada Jiménez, El harem político, Madrid, del Oriente y del Mediterráneo, 1999.

MERNISSI, Fatima, Chahrazad n'est pas Marocaine : Autrement, elle serait salariée!, Casablanca, Le Fennec, 1988. Essai.

MERNISSI, Fatima, Le monde n’est pas un harem. Paroles de femmes du Maroc, París, Albin Michel, 1991. Essai.

MERNISSI, Fatima, La peur-modernité : Conflit Islam démocratie, Paris, Albin Michel, 1992. Essai; traduction : Inmaculada Jiménez, El Miedo a la modernidad. Islam y democracia, Madrid, del Oriente y del Mediterráneo, 1992. (Leonor Merino: «La mujer en el Corán (para reflexionar ante la Biblia)», LEA, Madrid, La Escuela Agustiniana, Colegios Universitarios de España, nº 44, 1993, pp. 35-44).

MERNISSI, Fatima, Traduction en français Claudine Richetin (de l’anglais : Dreams of trespass. Tales of a Harem Girlhood, 1994): Rêves de femmes: une enfance au harem, Paris, Albin Michel, 1996. Rééd. Casablanca, Le Fennec, 1997. Et Paris, LGF/Le Livre de Poche, 1998. Traduction de l’anglais : Ángela Pérez, Sueños en el umbral. Memorias de una niña del harén, Barcelona, Muchnik Editores, 1995, 5ème éd., Muchnik Editores, 1999.

MERNISSI, Fatima, El poder olvidado: Las mujeres ante un Islam en cambio, Barcelona, Icaria, 1995.

MERNISSI, Fatima, Sultanes oubliées, Paris, Albin Michel, 1996. Casablanca, Le Fennec, 1996 (The forgotten queens of Islam, 1996). Essai; traduction de l’anglais: Aurelio Galmarini, Las sultanas olvidadas, Barcelona, Muchnik Editores, 1997. Rééd., Muchnik Editores, 1998.

MERNISSI, Fatima, Êtes-vous vacciné contre le harem ? Paris, Editions Le Fennec, 1998.

MERNISSI, Fatima, Le Harem et l’Occident, Paris, Albin Michel, 2001.

MERNISSI, Fatima, Les Sindbads marocains. Voyage dans le Maroc civique, Rabat, Marssans, 2004.

MERNISSI, Fatima, Un libro para la paz, El Aleph Editores, 2004

MERNISSI, Fatima, El hilo de Penépole. La labor de las mujeres que tejen el futuro de Marruecos, Barcelona, Lumen, 2005.




[1] Leonor Merino, "Fátima Mernissi: Voz humanista en el Islam”, EL PAÍS, “Cultura”, Madrid, 2 diciembre 2015.
[2] Leonor Merino, "Fátima MERNISSI, estudio de toda su obra y proyección de la misma”. Conferencia en el Instituto Egipcio de Estudios Islámicos, Madrid, 14 de diciembre 2015.
[3] Leonor Merino, - "A. Khatibi y A. Djebar renovación cultural y triunfo de la mujer", Estudios Humanísticos (Facultad de Filología de la UNIVERSIDAD DE LEÓN), nº 15, 1993, pp. 117-125.
- L. Merino, “Abdelkébir Khatibi : le visage de la terre est déjà recouvert des yeux de tant de bien-aimés disparus, EXPRESSIONS MEGHRÉBINES, Vol. 12, no 1, été 2013, pp. 121-124.
- L. Merino, "Lao Tse y Adelkébir Khatibi, articulación intertextual de un antisistema para crear un "ser" nuevo", Contextos (C.E.M.I.), Facultad de Filosofía y Letras, UNIVERSIDAD DE LEÓN, nº XIII/25-26, año 1995, pp. 207-221.
- L. Merino, “Marc Gontard lecteur d’Abdelkébir Khatibi ou écrire en langues”. Colloque International, “Passage, présence, aimance dans la littérature et les arts au Maroc”, Université Sidi Mohamed Ben Abdellah. Faculté des Sciences Humaines. Fès Dhar Mahraz, 25-26 mars 2010.
- L. Merino, "Ghita EL KHAYAT y Abdelkebir KHATIBI”. Conferencia, “Casa Árabe”, Madrid, 10 marzo 2015.
- L. Merino, "IN MEMORIAM Abdelkebir Khatibi, escritor y poeta marroquí", El País (Madrid) 18 de marzo, 2009, p. 45.
[4] Leonor Merino, El Soplo de la Vida El Polvo de la Tierra, Mayrit, Diwan, 2016, 3ª reed., espagnol-arabe.
[5] Leonor Merino, "Fátima Mernissi, Premio Príncipe de Asturias de las Letras 2003",  Diario de León, Suplemento Cultural, "Filandón", domingo 29 de junio, 2003, pp. 3-5.
[6] Leonor Merino, "Homenaje a Don Pedro Martínez Montávez", Crónicas Azahar, Revista de actualidad cultural del Instituto Egipcio de Estudios Islámicos (Madrid), Volumen XXXV, 2003, pp. 173-179.
[7] Fatima Mernissi, Le Harem politique, Paris, Albin Michel, 1987, p. 32.
[8] Casablanca, Eddif, 1997.
[9] Trésor de la langue française informatisé, Paris, CNRS Éditions, 2004.
[10] Albert Cossery, La violence et la dérision (1964), Paris, Éd. J. Losfeld, (1993) 2000.
[11] Sigmund Freud, Le mot d’esprit et sa relation à l’inconscient, Paris, Gallimard, 1930, p. 152.
[12] Étant donné que j’aime les comparaisons littéraires, je désire souligner que dans Femmes d’Alger dans leur appartement - un titre inspiré du fameux tableau de Delacroix avec des prisonnières résignées dans une continuelle attente et “énigmatiques au plus haut degré” -, Assia Djebar, comme Picasso, désire les arracher des modèles créés par le peintre romantique français et les garantir une émancipation physique et aussi métaphysique.
[13] Je retourne encore sur Assia Djebar dans Loin de Médine.
[14] Il avait dit: “Ne connaïtra jamais la prospérité le peuple qui confie ses affaires à une femme”. Il ne faut pas confondre Abu Bakra avec Abu Bakr: le premier calife.
[15] Dans La nouba des femmes du Mont Chenoua, le film d’Assia Djebar, ses images filmés et la musique de Bela Bartok sont le murmure de l’Algérie profonde et la parole des femmes rurales vers le monde extérieur.   
[16] Hélène Cixous, le sexe ou la tête?, Les Cahiers du GRIF, vol., 13, nº 13, October 1976, p. 15.